La séquestration du gaz carbonique est en cours d'évaluation dans un certain nombre d'expériences semi-industrielles. Les deux plus avancées sont celles du gisement de Sleipner exploité par la compagnie pétrolière norvégienne Statoil, et celle de Weyburn au Canada. Les deux expériences envisagent le stockage de 20 millions de tonnes de gaz carbonique. Weyburn (Saskatchewan) est un ancien gisement de pétrole. Le projet consiste à stocker dans ce gisement le gaz carbonique produit par l'usine de Beulah (Dakota du nord) qui transforme du charbon en méthane et autre hydrocarbures légers par réaction avec de l'eau. Une réaction de production de méthane, par exemple, s'écrit 2C+2H2O®CO2+CH4. Le processus conduit donc à la production de gaz carbonique transporté à Weyburn par un pipeline de 320 km. Dans le cas de Sleipner le gisement de gaz relâche, en même temps que du méthane ou d'autres hydrocarbures gazeux, de grandes quantités de gaz carbonique. Or le gouvernement norvégien impose une taxe Carbone de 55 $/tonne de CO2. La séparation du gaz carbonique, sa mise en pression et son renvoi dans le gisement ne coûtent à la compagnie Statoil que 15 $/tonne. Dans ces conditions, l'opération est donc rentable. Chaque année 1 million de tonnes de CO2 sont ainsi réinjectées dans le gisement. Jusqu'à présent, sur aucun des deux sites, les géophysiciens n'ont observé de remontée du gaz. Il s'agit là d'un point crucial qui devra être vérifié dans des expériences menées à beaucoup plus grande échelle.
Il faut remarquer que le temps nécessaire pour être sûr que la séquestration se fait dans de bonnes conditions est long puisque, par exemple, à raison de un million de tonnes par an il faut 20 ans pour arriver à stocker les 20 millions de tonnes que les experts estiment nécessaire pour évaluer un site de stockage. Il est probable que chaque site devra donner lieu à une évaluation spécifique. La problématique de la séquestration du gaz carbonique risque ainsi de se révéler beaucoup plus difficile, techniquement au moins sinon socialement, à traiter que celle du stockage des déchets nucléaires.
On estime que l'application de la séquestration au gaz carbonique produit dans des centrales électriques brûlant du charbon diminuerait l'efficacité de production de l'électricité d'environ 15% et augmenterait le coût du kWh d'environ 2 centimes d'Euros (le coût de l'électricité produite en France est d'environ 3 centimes d'Euros). Dans les conditions actuelles le coût de la séparation du CO2 se situe entre 20 et 70 dollars par tonne conduisant à elle seule à un surcoût compris entre 1,5 et 5 centimes d'Euros.
Accélérer la recherche développement sur la séquestration du gaz carbonique a donc un intérêt stratégique considérable quand on sait que le charbon et le gaz sont les sources principales d'électricité dans le monde, en particulier dans les économies américaine, chinoise, russe, allemande et indienne. Les USA ont un programme ambitieux en la matière avec la construction d'une centrale au charbon de 275 MW capable de fournir électricité et Hydrogène. Le principe est de produire du "gaz de ville", mélange d'Hydrogène et de monoxyde de Carbonne puis d'oxyder le monoxyde de Carbonne en gaz carbonique. Celui-ci est ensuite liquéfié puis transporté dans un site de stockage où il sert à améliorer la récupération de pétrole (gisement de pétrole) ou de méthane (gisement de gaz ou ancienne mine de charbon). Le coût prévu de l'installation est de 1 milliard de dollars (soit environ 8 milliards de dollars par Giga-Watt de puissance électrique, à comparer aux 3 milliards de dollars par GWe pour un réacteur EPR). A terme, le but du programme est de construire des centrales produisant de l'électricité sans rejets avec un surcoût de seulement 10% et d'obtenir un prix de l'Hydrogène équivalent à une prix du pétrole de 15 $/baril. Mais on est encore loin de ce but en admettant qu'on l'atteigne un jour.
référence:
Science vol.305 p.962
http://www.fe.doe.gov/programs/sequestration.geologic.index.html