Les centrales ne craignent pas les chutes d'avions
3 avril 2003 20:34
«Nos centrales sont plus solides que ce que nous pensions», affirme Ulrich Schmocker, directeur de la Division principale de la sécurité des installations nucléaires (DSN), en présentant jeudi le nouveau rapport élaboré par ses services.
Peu après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, la DSN affirmait déjà que les quatre centrales nucléaires suisses avaient peu à craindre de la chute d'un gros avion.
Aujourd'hui toutefois, elles peuvent le confirmer de manière documentée.
De l'accident
A l'époque de la mise en service des sites de Mühleberg (1969) et de Beznau (1972), on pensait surtout protection contre les inondations et les tremblements de terre.
A la fin des années septante toutefois, suite à une série impressionnante d'accidents survenus à des chasseurs F-104 Starfighter dans les pays de l'OTAN, divers pays se sont mis à exiger des normes de protection contre les chutes d'avions.
En Suisse, les deux centrales de Leibstadt (mise en service en 1979) et de Gösgen (1984) sont relativement proches de l'aéroport de Zurich.
On y a donc prévu des bâtiments capables de résister non seulement au crash d'un petit avion militaire, mais également à celui d'un gros porteur civil.
Le cas de figure prévoyait la chute d'un Boeing 707 en phase d'approche, volant à 370 km/h, avec des réservoirs pratiquement vides.
à l'attentat
Mais l'horreur du 11 septembre a obligé les experts à revoir leurs calculs. Cette fois, on a carrément pris en compte l'hypothèse de la chute d'un 747 avec des réservoirs pleins.
Selon les simulations de la DSN, même une pièce très lourde et très solide, comme l'arbre central de la turbine de l'avion, ne parviendrait pas à pénétrer jusqu'au cur du réacteur d'une centrale.
Celui-ci est en effet protégé par de multiples épaisseurs d'acier et de béton armé. Ce qui permet aux experts de conclure à un risque «très faible» pour les deux centrales les plus récentes et «faible» pour les deux plus anciennes.
Quant à l'incendie, la DSN rappelle que les quatre centrales suisses sont pourvues de systèmes de sécurité autonomes capables d'en diminuer l'impact en arrêtant automatiquement le réacteur et en évacuant la chaleur pendant dix heures.
Reste le cas du dépôt de Würenlingen, où sont stockés les déchets nucléaires dans l'attente d'un enfouissement définitif. Ici, Ulrich Schmocker est formel: la sécurité est doublement garantie, par la solidité du bâtiment et par celle des containers à déchets.
Difficultés d'approche
La DSN a également consulté des pilotes de ligne pour se faire une idée de ce que représenterait un attentat-kamikaze sur une centrale.
Il en ressort que les cibles sont difficiles à atteindre avec précision. Le bâtiment du réacteur d'un site nucléaire paraît en effet minuscule en regard des colosses que pouvaient être les tours jumelles ou le Pentagone.
Par ailleurs, les deux centrales «les moins solides», soit Beznau, et surtout Mühleberg, sont situées dans des environnements vallonnés qui interdisent une approche à grande vitesse.
Avant un vote sur l'avenir du nucléaire
La publication de ce rapport intervient fort opportunément à quelques semaines de la double votation sur l'avenir du nucléaire en Suisse. Ses auteurs se défendent toutefois d'avoir voulu contribuer à influencer le débat.
«Le texte était prêt et nous voulions le rendre public le plus vite possible», affirme le directeur de la DSN.
Un texte qui malgré tout n'a pas suffi à convaincre les milieux anti-nucléaires. Dans un communiqué publié jeudi, le comité de soutien aux deux initiatives anti-atomiques insiste sur le fait que, selon lui, «une catastrophe est toujours envisageable.»
swissinfo, Marc-André Miserez