AEPN - Association de Ecologistes Pour le Nucléaire
" Lélectronucléaire face aux risques majeurs "
La co-génération nest pas lapanage exclusif du gaz naturel. On sait faire et lon fait de la co-génération avec le charbon et le pétrole. Plus généralement tous les procédés thermiques (nucléaire compris car le nucléaire est un procédé thermique) de fabrication délectricité peuvent faire de la co-génération. Il est vrai que le nucléaire actuel ne profite pas de la co-génération car les réacteurs actuels, trop gros, sont implantés trop loin des grands centres de consommation pour que la vapeur moyenne / basse pression puisse, de façon économique, être acheminée vers les installations de chauffage urbain.
Ce handicap de non co-génération disparaîtra avec les réacteurs de la prochaine génération : ceux-ci seront de puissance unitaire plus modeste et implantés plus près des villes car ils bénéficieront de dispositifs de sécurité intrinsèque. Ils pourront donc produire une vapeur basse / moyenne pression économiquement utilisable.
Enfin dans les pays à court deau douce ils sauront également, via le dessalement deau de mer, valoriser lénergie " Carnot " perdue actuellement dans les circuits de refroidissement : aujourdhui 30 millions de M3 sont dessalés chaque jour et ce chiffre passera à 100 millions dans moins de 20 ans.
Lénergie la plus propre est celle que nous nutilisons pas : cest vrai. Mais, paradoxalement, elle est très chère à court et moyen terme avant de devenir gratuite à long terme. Létude du Commissariat au Plan " Energie 2010-2020 " montre quun pays développé comme la France pourrait économiser plus de 40% de lénergie quelle consomme, ceci sans sacrifice significatif sur la qualité de vie. Mais il faudrait, par exemple, modifier lhabitat, léquipement électroménager et les modes de transport. Affaire de culture sociale, non de lois : il y faudra quelques générations.
Quoi quil en soit cest une démarche que les pays développés devraient entreprendre tout de suite ; ils se sont développés dans un contexte de gaspillage créé par une énergie bon marché, trop bon marché. Ils devraient dès maintenant aider les pays émergents à ne pas faire la même erreur, cest à dire les encourager et les aider à se développer dans un contexte de bonne efficacité énergétique cest à dire de faible intensité énergétique ( faible consommation par unité de PIB).
Il nen reste pas moins que plus de la moitié de la population mondiale consomme, par tête dhabitant, 4 à 5 fois moins dénergie que les habitants des pays de lOCDE, près de 10 fois moins que chaque citoyen américain : leur enrichissement nécessaire et urgent ne pourra se faire sans un accroissement considérable (multiplication par 2 ou 3) de leurs consommations.
Plusieurs milliards dhommes ne peuvent économiser lénergie quils ne consomment pas.
La France dispose duranium sur son territoire. Elle en reprendrait lexploitation si les prix mondiaux venaient à exploser. Précisons ici quune multiplication par 4 du prix mondial de luranium aurait, sur le coût du kWh nucléaire, le même impact que + 3 $/baril de pétrole sur le coût du kWh pétrolier ou gazier (le prix du gaz suit celui du pétrole avec quelques mois dhystérésis). Luranium participe donc réellement à lindépendance énergétique de notre pays.
Ce très grave accident de 1979 (fusion du cur entraînant la perte du réacteur) n'a pas été meurtrier. Les enseignements de TMI ont été mis à profit par la communauté nucléaire occidentale pour améliorer encore la sécurité des réacteurs. Le système soviétique, malheureusement, ignora ces enseignements d'où
Rappelons ici que ce fut un accident soviétique beaucoup plus qu'un accident nucléaire. Les dommages sanitaires qui l'ont suivi étaient très largement évitables. Voir à ce propos, sur le site de l'AEPN www.ecolo.org les deux études " Causes de l'Evènement Tchernobyl " par Jacques FROT et " Tchernobyl : Quelles conséquences sanitaires ? " par le Professeur André AURENGO.
Le sujet ne fut pas abordé dans le débat. Jaimerais rappeler ici (1) que les nations détentrices de larme nucléaire ont su y accéder avant davoir des réacteurs de puissance : lélimination de lélectronucléaire néliminerait pas les armes nucléaires; (2) on peut, par exemple, transformer un cur de réacteur à vocation médicale et lui faire fabriquer du Pu 239 militaire ; (3) les armes biologiques et chimiques sont beaucoup plus redoutables que les armes nucléaires car plus faciles et moins chères à fabriquer.
Ce problème est techniquement modeste comparé, par exemple à celui que posent les émissions de G.E.S. des combustibles fossiles. Mais des médias marchands de peur ainsi que des intérêts mercantiles et politiques lont transformé en un gigantesque problème de société qui conduit le monde nucléaire vers des solutions dont la justification du caractère extrêmement dispendieux nest pas établie.
Il serait bon que lInstitut de France soit appelé à se prononcer sur le problème des déchets radioactifs comme il vient de le faire, pour les OGM, par les voix des Académies Nationales des Sciences et de Médecine.
Dans une interview récente, de son côté, le Professeur André AURENGO passait à la casserole la peur irraisonnée qui se fait jour à propos des antennes-relais. Il s'indignait, plus généralement, du "renversement de la charge de la preuve" : les accusateurs ne produisent aucune preuve de dangerosité et demandent aux accusés (OGM, antennes-relais, déchets nucléaires ) de prouver leur innocence !
Nos académiciens sont guidés non par des considérations politiques ou mercantiles mais seulement par la connaissance, c'est à dire par la vérité scientifique lorsqu'ils la maîtrisent. Leur discours est donc crédible. Le discours des cultivateurs de la peur ne l'est pas.
Je renvoie le lecteur à létude de Jacques PRADEL, ancien Président de la Société Française de Radio-protection, membre de lAEPN " Les déchets radioactifs : une approche simple et réaliste " quil vous communique par ailleurs et qui est disponible sur le site AEPN www.ecolo.org
Je ne me lancerai pas dans un inventaire de lépouvante et ne rappellerai que quelques évènements majeurs actuels ou récents mais déjà sortis des mémoires (Sources : Quid 1997):
Ferry Estonia (Finlande 1994): 840 morts
Bhopal (Inde 1984) : quelques milliers de morts
Seveso (Italie 1976) : 0 mort ; conséquences à terme incertaines.
Accidents de la route (Monde 1994) : 400 000 tués et 12 000 000 de blessés
Un large fossé sépare la gravité objective d'un événement et sa représentation dans l'esprit du public.
Il a fallu au chemin de fer, né dans le premier quart du 19ème siècle, quelques générations de locomotives et de wagons avant quil atteigne, en 150 ans, son niveau actuel de maturité dans les domaines de la vitesse, de la sécurité et du confort. Lexpérience des trains fumant et cahotant à 30 puis à 50 et 80 km/h fut un chemin difficile et nécessaire vers le progrès. Lénergie nucléaire est à laube de son histoire : dautres générations de réacteurs, conçues et construites sur les bases de lexpérience acquise avec les premiers réacteurs, ceux dhier et daujourdhui, en feront un outil énergétique encore plus formidable et à la disposition de tous les hommes.
Le panorama énergétique du futur dépendra de la capacité sociale à accepter ou à refuser :
- les risques liés à laccroissement de leffet de serre,
- ceux liés à lutilisation de lénergie nucléaire,
- ceux associés aux transports individuels,
- lépuisement des énergies fossiles,
- les efforts defficacité énergétique,
- de se préoccuper des prochaines générations ;
In fine ce panorama dépendra du choix que feront les hommes entre le rationnel et lirrationnel.
08 janvier 2003