A PROPOS DE L’EFFET DE SERRE
Mécanisme et problème
Par Jacques FROT
L’effet
de serre atmosphérique est un phénomène naturel créé par la vapeur d’eau
présente dans l’air. Pour être en équilibre thermique, c’est-à-dire jouir d’une
température stable, tout corps ou tout lieu doit restituer autant d’énergie
qu’il en reçoit. L’énergie thermique, reçue du soleil par notre planète sous
forme de rayons dans les longueurs d’onde du visible, est restituée vers
l’espace sous forme de rayons infra-rouges. La vapeur d’eau hébergée par
l’atmosphère freine ces infra-rouges dans leur trajet de retour vers l’espace:
d’où la création d’un mécanisme de « forçage radiatif » qui ne peut
apparaître que par une élévation de température. C’est le même mécanisme que
dans les serres à végétaux ou, par beau temps froid et sec, dans les
habitations généreusement exposées au sud. Au contraire il fait froid en
altitude car l’air raréfié contient peu de vapeur d’eau; froid ou frais
également la nuit dans les déserts car l’atmosphère y est très sèche et ne
retient donc guère les rayons infra-rouges dans leur retour vers l’espace. Pour
la même raison, sous nos latitudes, le froid hivernal est plus vif par temps
clair. Grâce à l’effet de serre la température moyenne qui règne sur la terre
est 15°c: sans lui elle serait de -18°c. Pire: le blanc glacé qui recouvrirait
alors une grande partie de la terre -se substituant au vert des forêts et des
campagnes- augmenterait la réflexion vers l’espace (phénomène dit d’albédo) et
ferait descendre la température au voisinage de -50°c.
L’effet
de serre est donc une bénédiction. Ce qui pose problème c’est l’accroissement de
l’effet de serre dû aux gaz à effet de serre G.E.S. qu’engendrent les activités humaines: gaz carbonique CO2 et méthane CH4 principalement, oxydes d’azote NOx à un moindre degré. Le CO2 anthropique, principal
responsable de l’accroissement de l’effet de serre, provient à peu près
exclusivement des combustibles fossiles carbonés: charbon (près de 100% de
carbone C), pétrole (95% poids de C) et gaz naturel (= méthane CH4, 75% poids
de C). Ils ont fait croître d’un tiers la teneur de l’atmosphère en CO2 depuis
1750, aube de l’ère industrielle. Le doublement, au cours du 21ème
siècle, par rapport à la teneur actuelle est probable et très inquiétant.
Quant
au CH4
il provient de l’agriculture (rizières surtout) et des fuites sur les gazoducs
de l’ex URSS. Le développement rapide de la consommation charbonnière des PVD
-on ne peut le leur reprocher, chacun son tour- est une sérieuse menace pour
l’avenir du climat.
Le CO2 et le CH4 qui proviennent des activités humaines semblent
responsables d’un accroissement de température moyenne du globe terrestre de
0,6°c au cours du 20ème siècle. Cet accroissement pourrait être de plusieurs °c d’ici 2100,
entraîner une hausse significative (plusieurs dizaines de centimètres) du
niveau des mers par fonte des glaciers et calottes glaciaires et, bien plus
encore, par l’expansion thermique des eaux marines: ceci peut être
catastrophique, voire cataclysmique pour les très nombreuses populations qui
vivent en bord de mer dans des régions plates donc vulnérables aux raz de
marée.
Cet
aspect du problème demeure cependant riche en inconnues: car les océans ont un
impact déterminant sur le climat. Or, autant la dispersion des G.E.S dans l’atmosphère
est rapide et conduit à une homogénéité en quelques semaines, autant, au
contraire, la viscosité de l’eau, bien plus grande que celle de l’air,
l’absence de brassage en dessous de -100 m (alors que la profondeur moyenne des
océans est de 3300m) et l’inertie thermique des océans, 1000 fois plus grande
que celle de l’atmosphère, font que les impacts climatiques des milliards de
tonnes de CO2 dispersés chaque année dans les airs et qui, pour la
moitié, y séjournent une centaine d’années, n’apparaîtront qu’au fil des
siècles, voire des millénaires . « Le coup est tiré », le futur du
climat est écrit mais inconnu, il est irréversible: ce n’est pas une raison
pour ne pas s’attacher à « rectifier le tir ». D’autant que le rythme des changements climatiques, rythme qui semble devoir déborder les capacités
d’adaptation des écosystèmes et des hommes, est plus préoccupant encore que
l’ampleur des changements proprement dits.
La
relation de cause à effet entre les émissions de G.E.S et l’élévation de
température, source de changements climatiques, fut établie grâce à des
carottages glaciaires et sédimentaires: elle est presque universellement admise
maintenant par les climatologues. Les preuves définitives, au sens scientifique
du terme, ne sont pas parfaitement acquises (d’où quelques contestations
rémanentes sur la précision des mesures, voire sur le sérieux de leurs
interprétations) mais les présomptions sont suffisamment fortes et la menace
suffisamment sévère pour que les hommes se comportent désormais comme s’il y
avait preuve absolue et appliquent donc le Principe de Précaution et le Principe de Naturalité .
C’est pourquoi l’ONU et l’OMM (Office Mondial de la Météorologie) ont créé en 1988 l’IPCC (International Panel for Climate Change), GIEC en français (Groupement International pour les Études Climatiques ). En 1997, à KYOTO (Japon) les pays développés, réunis dans le cadre du GIEC se sont fixé un objectif de réduction des émissions de G.E.S; ces émissions devront, en 2008-2012, être inférieures de 5% à ce qu’elles furent en 1990: objectif ambitieux, difficile à atteindre...et cependant très insuffisant pour résoudre le problème. Mais il instaure un comportement nouveau et salutaire. Les PVD, dont le développement est, à juste titre, l’objectif le plus urgent, ne sont pas, ne peuvent être concernés par les réductions d’émissions de G.E.S. Ils les augmenteront inévitablement de façon importante.
L’objectif
fixé à KYOTO fut distribué entre les pays de l’OCDE: par exemple l’objectif de la France, « bonne élève » grâce à son nucléaire
et son hydraulique, est 0% (c’est à dire
émissions 2008-2012 = émissions 1990), celui de l’Allemagne -21%.
J’aborderai,
dans un prochain message, la question « Comment
réduire les émissions de G.E.S »
Jacques FROT
Ingénieur pétrolier
Ancien Directeur dans le Groupe Pétrolier MOBIL OIL
Animateur de GR.COM Groupe de COMmunication
de l’AEPN Association des Ecologistes Pour le NUcléaire