Courrier à : LaMontagne&Alpinisme.

Le 19 août 2002

 

Monsieur le Directeur de la rédaction de

La Montagne et Alpinisme

Club Alpin Français et Groupe de haute montagne

24, Avenue Laumière

75019 Paris

 

 

 

Monsieur le Directeur,

Un ami alpiniste abonné à votre revue m'a transmis l'article que vous avez publié dans votre numéro 2/2002, signé Jean-Pierre Buraud, intitulé: "La montagne est-elle radioactive?"; ainsi qu'une page où dans le même numéro un de vos lecteurs exprimait des critiques très vives contre les autorités françaises pour avoir caché à la population l'ampleur de la contamination sur notre territoire due à l'accident de Tchernobyl.

Je crois utile de porter à la connaissance de vos lecteurs le fait que le Professeur Pierre Pellerin, l'autorité française qui a analysé la situation au moment de l'accident de Tchernobyl, et qui a exprimé l'avis tant critiqué, disposait d'éléments de jugement que peut-être personne au monde n'avait en main. Il avait en effet mené une étude approfondie des répercussions sur la chaîne alimentaire des explosions atomiques aériennes effectuées par tous les pays du monde dotés d'armes nucléaires, de 1954 à 1966. Il avait pour cela installé sur le territoire français un réseau de stations pour mesurer les retombées au sol: poussières dans l'air, précipitations. Il avait également analysé l'herbe, et le lait des vaches ayant brouté cette herbe, les os des lapins, et des thyroïdes de bovins. De ces études considérables, il tirait une bonne connaissance de la façon dont les végétaux assimilent les éléments radioactifs résultant de la fission de l'uranium et du plutonium, et de la façon dont les mammifères assimilent ces végétaux. L'homme est un mammifère.

Lors du passage du "nuage de Tchernobyl", les résultats des mesures de contamination de l'air lui parvenaient. En se référant aux connaissances tirées de cette grande étude, le professeur Pellerin a pu analyser finement la situation, et a conclu qu'il n'était pas nécessaire de modifier les habitudes alimentaires de la population de France. Cela n'avait rien à voir avec le "lobby" nucléaire. Les réflexions d'aujourd'hui exprimées par l'autorité de sûreté nucléaire confirment que le Professeur Pellerin ne s'était pas trompé.

Je pense qu'il était assez remarquable et courageux de ne pas recommander de détruire les récoltes des agriculteurs. Plus important encore sans doute: on dit que dans les pays voisins qui ont fait une recommandation inverse, de très nombreuses femmes, affolées, se sont fait avorter. Les enfants ainsi condamnés ont été à coup sûr des victimes de Tchernobyl. Le principe de précaution souvent mis en avant aujourd'hui conduit à oublier de si graves conséquences.

Autre élément d'information pour vos lecteurs: le corps de chaque être humain émet environ 10 000 becquerels. Je pense que cela montre qu'il faut relativiser les chiffres apparemment élevés cités dans votre article. Le becquerel est une unité si petite qu'on arrive facilement à des chiffres impressionnants.

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'expression de mes sentiments distingués.

 

 

 

Robert Baschwitz

Membre de l'Association des Ecologistes Pour le Nucléaire, AEPN

http://www.ecolo.org