Subject: Hydro-Québec: Projet de centrale à gaz

 

Date: Mon, 25 Feb 2002 06:32:12 EST

 

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Messieurs,

 

J'ai beaucoup apprécié l'article de Michel CORBEIL qui développe d'utiles arguments pour s'opposer au projet de centrale à gaz. Je vous remercie de l'avoir publié.

 

En tant qu'animateur du Groupe de Communication (GR.COM) de l'Association des Écologistes Pour le Nucléaire (AEPN) et en tant qu'ingénieur pétrolier et gazier je me permets de revenir un peu plus longuement sur deux des arguments " anti-gaz " présentés par Michel CORBEIL.

 

La pollution atmosphérique

Chaque année les hommes extraient des entrailles de la terre 7 milliards de tonnes de carbone sous forme de charbon, de pétrole et de gaz naturel. Dans quelques décennies ce chiffre aura doublé si, comme il faut l'espérer, les pays aujourd'hui pauvres prennent le virage du développement industriel et si, simultanément et comme il faut le craindre, les pays aujourd'hui développés ne changent pas de comportement.

Rappelons ici que, aujourd'hui, 20% des hommes consomment 60% de l'énergie mondiale et que les 80% de pauvres en sont avides. Ces gigantesques quantités de carbone se retrouvent dans l'atmosphère sous forme essentiellement de gaz carbonique : elles vont y séjourner pour la moitié une centaine d'années, accroître l'effet de serre et, vraisemblablement, nous conduire vers des changements climatiques au mieux douloureux, probablement catastrophiques et, au pire, cataclysmiques. Est-il besoin de préciser ici que le gaz naturel c'est 75% en poids de carbone. Donnée qui ridiculise le discours de trop d'écologistes qui attribuent au gaz la vertu d'énergie non polluante.

 

Les prix du gaz

Aucun économiste n'ignore que les prix du gaz suivent, avec une brève hystérésis (quelques mois) ceux du pétrole. Ce phénomène est clairement établi depuis l973, année de la première crise pétrolière mondiale. Aucun économiste, aucun expert de la géopolitique n'ignore que les réserves mondiales de pétrole -1/2 siècle seulement, comme pour le gaz naturel- sont pour 55% aujourd'hui entre les mains de 4 pays politiquement peu sûrs : l'Arabie Saoudite, l'Irak, l'Iran et le Kuwait. Ce ratio de 55% passera vite - quelques décennies- à 80% si les réserves nationales continuent à être exploitées de la même façon. Et cela ira encore plus vite si les pays en voie de développement se précipitent vers les plaisirs de l'automobile : près de 500 millions de véhicules à moteur sillonnent aujourd'hui les routes de notre planète, il serait surprenant qu'ils soient moins d'un milliard d'ici un demi siècle.

Le demande de pétrole va croître : vite et beaucoup ; avec elle le prix du pétrole, donc celui du gaz, vont croître : ils peuvent exploser.

Pour ces deux raisons, développer la production d'électricité gazière aujourd'hui, dans un pays riche, est complètement irresponsable.

Jacques FROT

Ancien Directeur dans le Groupe Pétrolier MOBIL OIL

Animateur du Groupe de Communication GR.COM de l'AEPN